Depuis 2010, l’association Ar Roc’h propose un soutien téléphonique aux familles. Au départ local, ce service reçoit en fait des appels de toute la France et témoigne, si besoin en était, du profond besoin d’écoute des parents. L’association est aussi spécialisée dans les troubles du comportement, à la définition de plus en plus floue.

Ah, la force de frappe des médias grand public ! Allo Parlons d’enfants, plateforme d’écoute téléphonique créée en 2010, doit en grande partie son existence à l’émission Envoyé Spécial. En 2006, un reportage est en effet consacré à l’un des ITEP (Institut Thérapeutique, Educatif et Pédagogique) géré par l’association Les Amis du Rocher devenue depuis Ar Roc’h. Cet organisme, basé en Ille-et-Vilaine, est spécialisé dans la prise en charge des enfants souffrant de troubles du comportement. A l’époque plusieurs spécialistes tirent la sonnette d’alarme au sujet de ces « enfants tyrans » qui débordent du cadre et qui laissent leurs parents désemparés voire totalement dépassés. Après la diffusion du sujet, l’association est submergée d’appels de familles qui reconnaissent dans les jeunes filmés le comportement de leur propre progéniture ou d’enseignants confrontés à des problématiques similaires en classe. Pendant trois ans la structure réfléchit au sein d’un comité de pilotage à ce qu’il serait judicieux de mettre en place pour répondre aux angoisses et difficultés de ces parents et professionnels. C’est ainsi que naît la plateforme d’écoute « Allo Parlons d’enfants » -numéro pas gratuit mais non surtaxé, le 02 99 55 22 22- , au départ uniquement destinée aux familles du département. Les réseaux sociaux aidant, ce sont bientôt des parents de toute la France qui décrochent leur téléphone. Deux écoutants répondent aux 500 à 1000 appels annuels, de 12h00 à 19h00 les lundis, mardis, et vendredis et de 10h00 à 19h00 les mercredis et jeudis.

De l’écoute et de l’information plus que de l’orientation

Lancé dans un objectif de prévention, pour aider parents et professionnels à identifier d’éventuels troubles, ce numéro répond en fait à des demandes dépassant largement la question des troubles du comportement. « Notre mission, c’est l’écoute, le soutien, l’information et éventuellement l’orientation vers un professionnel, résume Hervé Clech, coordonnateur de la plate-forme et du pôle parentalité de l’association Ar Roc’h. En fait nous orientons très peu les gens. Ils ont essentiellement besoin de se poser et d’être écoutés. On les aide à réfléchir sur la situation, à trouver eux-mêmes les réponses.» Les appels durent en moyenne 45 minutes et sont totalement anonymes. Le motif initial de l’appel réside souvent dans un problème de communication avec l’enfant ou l’adolescent. Ce sont essentiellement des parents de tout petits ou d’adolescents qui sollicitent la plate-forme. Pour un enfant qui ne se développerait pas normalement, ou qui « ne serait pas comme l’enfant de la cousine », pour des problèmes d’addiction, notamment aux écrans, ou de respect des règles. « Nous dédramatisons mais nous ne banalisons pas, prévient Hervé Clech. Tout symptôme rapporté par le parent est pris en compte. Il peut nous arriver de dire « vous avez bien fait d’appeler », par exemple quand un parent s’inquiète de symptômes d’ordre psychotique ». Allo Parlons d’enfant, se décline également sur le web avec un site dédié.

Face à des troubles du comportement, accompagner la famille dans son ensemble

Concernant le cœur de métier de l’association, les troubles du comportement, ils font l’objet de plus en plus de notifications. Sans qu’il soit très aisé d’expliquer cette augmentation. Pour les professionnels de la structure en tous cas, il apparaît important de s’intéresser à la famille d’un jeune porteur de ces troubles. Car en ciblant spécifiquement l’enfant et ses troubles, en l’isolant de son foyer pour lui proposer une prise en charge spécialisée, on en oublie de prendre en compte la famille et son fonctionnement potentiellement pathogène. Or, que se passe-t-il lorsque ce jeune réintègre le domicile familial ? Les parents râlent : « ok, vous nous dites que dans l’établissement ça va beaucoup mieux mais quand il revient à la maison, ça ne s’améliore pas ! »

Ar Roc’h propose donc à tous les parents dont les enfants sont suivis dans une de leur structure un accompagnement au sens large. Cette suggestion est totalement facultative. « Nous essayons de changer les choses en nous appuyant sur le potentiel de chacun, en nous décentrant du jeune et en nous adressant à la famille dans son ensemble », pose Hervé Clech. Quelques 20% des familles dont les enfants sont suivis sont demandeuses de cet accompagnement.